[Foenkinos, David] La délicatesse

Résumé :

François pensa : si elle commande un déca, je me lève et je m’en vais. C’est la boisson la moins conviviale qui soit. Un thé, ce n’est guère mieux. On sent qu’on va passer des dimanches après-midi à regarder la télévision. Ou pire : chez les beaux-parents. Finalement, il se dit qu’un jus ça serait bien. Oui, un jus, c’est sympathique. C’est convivial et pas trop agressif. On sent la fille douce et équilibrée. Mais quel jus ? Mieux vaut esquiver les grands classiques : évitons la pomme ou l’orange, trop vu. Il faut être un tout petit peu original, sans être toutefois excentrique. La papaye ou la goyave, ça fait peur. Le jus d’abricot, ça serait parfait. Si elle choisit ça, je l’épouse…

– Je vais prendre un jus… Un jus d’abricot, je crois, répondit Nathalie.

Il la regarda comme si elle était une effraction de la réalité.

Éditeur : Folio
Date de parution : 27 mai 2014
Prix : 7,10 €

Mon avis :

Lecture peu ordinaire. Je ne l'ai appréciée qu'au moment de... refermer le livre ! C'est une première pour moi. Vous m'auriez demandé mon avis pendant la lecture, j'aurais dit que je n'accrochais pas, que certains personnages m'ennuyaient, que le sujet amoureux ne m'intéressait pas, etc. Et pourtant, je ne peux m'empêcher de penser là, au sortir du livre, que j'ai lu quelque chose de diablement bon ! C'est un roman moderne romantique (le romantisme du XIXe siècle bien entendu ), avec tous les ingrédients : la passion fiévreuse, la mélancolie, l'idéal inaccessible, l'alliance du sublime et du grotesque, les ruptures formelles (j'y reviendrai), le rythme en dent de scie tantôt effréné tantôt engourdi par la nostalgie, etc.
À la fois rien et à la fois tout est laissé au hasard. Le lecteur est un voyeur qui s’immisce dans l'histoire de la belle Nathalie : il compatit à ses malheurs, rit de ses joies, mais se sent toujours de trop, embarrassé de commenter sa vie privée (comme se permettent de le faire ses collègues d'ailleurs, ce qu'elle déteste ). Le parfait François, le compatissant patron amoureux Charles, l'affreux suédois Markus... chacun de ces hommes jouera un rôle dans ce roman passionnel.
L'écriture est très vive, il y a plus d'une centaine de chapitres ! L'auteur n'hésite pas à insérer des chansons, des dialogues de théâtre ou de cinéma, des paroles de célébrités, des recettes de cuisine, des listes de possibilités, etc. à la place des lignes de son roman. Évidemment, quand on est dans l'ambiance, on comprend les messages et ce qu'il se passe. C'est un trait de génie : réussir à raconter l'histoire sans en écrire tous les passages ! Cela permet aussi de ne jamais tomber dans la vulgarité (par exemple, une scène d'amour sera remplacée par un extrait d'autre ouvrage sur le même thème).

Ma note : (je me vois obligée d'enlever une demi-étoile... cela "ne se fait pas" d'obliger le lecteur à aimer ce bouquin seulement lorsqu'il est terminé ! )