[Borges, Jorge luis] l'aleph

« L'Aleph restera, je crois, comme le recueil de la maturité de Borges conteur. Ses récits précédents, le plus souvent, n'ont ni intrigue ni personnages. Ce sont des exposés quasi axiomatiques d'une situation abstraite qui, poussée à l'extrême en tout sens concevable, se révèle vertigineuse. Les nouvelles de L'Aleph sont moins roides, plus concrètes. Certaines touchent au roman policier, sans d'ailleurs en être plus humaines. Toutes comportent l'élément de symétrie fondamentale, où j'aperçois pour ma part le ressort ultime de l'art de Borges. Ainsi, dans L'Immortel : s'il existe quelque part une source dont l'eau procure l'immortalité, il en est nécessairement ailleurs une autre qui la reprend. Et ainsi de suite... Borges : inventeur du conte métaphysique. Je retournerai volontiers en sa faveur la définition qu'il a proposée de la théologie : une variété de la littérature fantastique. Ses contes, qui sont aussi des démonstrations, constituent aussi bien une problématique anxieuse des impasses de la théologie. » Roger Caillois.

Mon avis :

Second recueil de Borges que je lis, et je reste sur la même impression : cet auteur n’est pas fait pour moi. Dans Fictions, j’avais vraiment eu du mal à comprendre les différentes nouvelles, n’y voyant que folie (et génie peut-être, mais folie quand même ! ). Je n’ai pas eu ce problème dans L’aleph , ou du moins il fut moindre. Oui on a du mal au début mais les fins sont claires, surprenantes, et intelligentes. Ce que j’ai moins aimé, ce sont surtout deux des trois thèmes principaux du bouquin : la théologie et la philosophie. Bien documenté et parsemé de références littéraires et culturelles de tous les horizons (du monde arabe au monde chrétien, de l’Antiquité à l’époque contemporaine, …), ce livre présente de sérieuses difficultés de lecture pour le lecteur ordinaire (= moi). Et si les réflexions sont intéressantes (ce n’est pas mon truc mais cela n’enlève rien à leurs qualités), elles apportent quand même un manque de rythme et un certain ennui.
Cependant, un troisième thème est abordé : celui du labyrinthe. J’ai vraiment apprécié chacune des nouvelles parlant d’un labyrinthe ! Je n’aurais jamais pu imaginer tant de façons de décliner ce sujet !
Au niveau fantastique, sont abordés notamment les questions de l’immortalité, de la mythologie, du pouvoir divin… Chaque nouvelle n’avait pas une dose de surnaturel, mais le mystère (agréable ou exaspérant) était partout.

Sur les 17 nouvelles :
- Je n’ai pas trop aimé : Les théologiens, Histoire du guerrier et de la captive, L’Autre Mort, Le Zahir, L’écriture de Dieu, L’homme sur le seuil, L’aleph.
- J’ai apprécié (mais sans plus) : L’Immortel, Le Mort, Biographie de Tadeo Isodoro Cruz, Deutsches Requiem, La quête d’Averroës, Abenhacan et Bokhari mort dans son labyrinthe, L’attente.
- J’ai eu un coup de cœur pour : Emma Zunz, La demeure d’Astérion, Les deux rois et les deux labyrinthes.

Bref, le bilan n’est pas entièrement négatif mais pas non plus enthousiaste, et il faudrait sans doute une seconde lecture pour que je puisse vraiment apprécier l’œuvre... Mais pour être honnête, je doute d’en avoir un jour le courage.
Cependant, si vous voulez découvrir Borges (qui n’a écrit il me semble que des nouvelles ), je vous recommande bien plus L’aleph que Fictions ! Par contre, ça n’est pas une lecture pour se détendre, et même si c’est très court (environ 215 pages), il vaut mieux prévoir quelques jours, pour éviter de s’ennuyer.

Ma note :