[Barjavel, René] la nuit des temps

Dans l’immense paysage gelé, les membres des Expéditions Polaires françaises font un relevé du relief sous-glaciaire. Un incroyable phénomène se produit : les appareils sondeurs enregistrent un signal. Il y a un émetteur sous la glace…
Que vont découvrir les savants et les techniciens venus du monde entier qui creusent la glace à la rencontre du mystère ?
La nuit des temps, c’est à la fois un reportage, une épopée mêlant présent et futur, et un grand chant d’amour passionné. Traversant le drame universel comme un trait de feu, le destin d’Elea et de Païkan les emmène vers le grand mythe des amants légendaires.

Que dire de ce livre?

J'ai rarement lu quelque chose d'aussi beau, poétique, boulversant. J'en suis encore toute retournée!

Cette histoire est tout simplement magique. On suit une équipe de chercheurs français qui découvriront un monde enfoui dans la glace. Lors de leur découverte, ils trouvent deux corps congelés, celui d'un homme et d'une femme. Après bien des efforts, ils parviennent à réveiller Eléa et à travers elle, ils découvriront un monde ancien, beau, utopique et comment ce monde fut détruit...

Dans ce livre, il n'y a rien à jeter.

Le style est simple, sans vocabulaire compliqué, mais les mots sont choisis avec une telle subtilité que ce roman pourrait être qualifié de très long poème. Parfois, je m'arrêtais dans ma lecture pour savourer ces quelques phrases qui disaient ce que des milliers de gens ont déjà dit auparavant, mais sans le talent du maître Barjavel.

Les personnages en eux-mêmes sont attachants. L'auteur nous dépeint une fresque mondiale, nous raconte une histoire où toutes les nationalités ou presque sont présentes et les caricature à l'extrême. Ce faisant, il pose une critique très claire sur l'hypocrisie des alliances établies entre les différentes puissances mondiales. Et à travers l'histoire d'Eléa et Païkan, il montre une autre voie: celle de l'amour fraternel, universel, qui serait possible si chacun aimait vraiment l'autre et ressentait vraiment un désir de paix. C'est ce que nous montre Eléa, à travers ses souvenirs et son amour pour Païkan.

Une autre chose qui est asbolument magnifique dans le roman est la transition subtile entre différents genres littéraires. On commence ce livre dans la science-fiction, pour se retrouver avec des passages très philosophiques, à la limite de l'onirique, pour finir dans ce que j'appelerais un roman suspens-thriller. Sans mentionner la révélation de la fin, qui ajoute au tragique de l'histoire.

Bref, La Nuit des Temps est officiellement devenu mon livre préféré de la littérature française et j'éprouve désormais une admiration sans borne pour René Barjavel. Je vais m'empresser de lire 'L'Enchanteur' qui est déjà sur mes étagères.



A méditer:

Tu as regardé les côtelettes avec horreur. Tu as dit:
- C'est un morceau coupé dans une bête?
Je n'avais pas pensé à ça. Jusqu'à ce jour, pour moi, une côtelette n'était qu'une côtelette.
J'ai répondu avec un peu de gêne:
- Oui.
Tu as regardé la viande, la salade, les fruits. Tu m'as dit:
- Vous mangez de la bête!... Vous mangez de l'herbe!... Vous mangez de l'arbre!...
J'ai essayé de sourire. J'ai répondu:
- Nous sommes des barbares.
J'ai fait venir des roses.
Tu as cru que ça aussi nous le mangions... (P.158)

Notre Déclaration devra frapper au coeur tous les hommes vivants. Elle n'aura qu'un paragraphe, peut-être qu'une phrase. Il faudra bien chercher, pour mettre le moins de mots possible. Elle dira simplement quelque chose comme ça:
" Moi, l'homme, je suis anglais ou patagon et heureux de l'être, mais je suis d'abord l'homme vivant, je ne veux pas tuer et je ne veux pas qu'on me tue. je refuse la guerre. quelles qu'en soient les raisons." C'est tout. (P. 323)

J'ai commencé à le lire vendredi dernier pour la lecture commune et l'ai quasiment fini (je ne l'avais pourtant pas continué depuis mais il se lit très vite). Du coup, je peux déjà dire que je suis conquise !! Je vais attendre d'avoir lu la fin (même si je sais malheureusement comment le tout fini vu qu'on me l'avait déjà raconté... j'ai une folle envie de ne pas la lire mais je suis incapable d'arrêter ma lecture !) pour me faire un avis final mais retrouver le style de Barjavel (découvert l'été dernier avec Le grand secret) est un réel plaisir.
J'adore toujours autant son style d'écriture limpide, sa capacité à nous tenir en haleine au point de vouloir littéralement dévorer les pages, ainsi que le fait qu'il nous fasse ressentir autant d'émotion au travers de mondes laissant aussi rêveurs que dérangés et de personnages forts que l'on souhaiterait souvent protéger de la fin s’annonçant sans cesse tragique. J'ai par contre trouvé assez cruel de nous faire mariner 80 pages avant de nous révéler ce qu'est "le signal". Heureusement d'ailleurs que je le savais déjà ou j'aurais fais une syncope !! Mais au moins l'entrée dans le livre est au moins plus que réussite : j'ai rarement eu autant de découvrir la révélation (alors que je la connaissais en plus !) et tourner aussi frénétiquement des pages pour savoir la suite ! Il est également assez impressionnant de voir que rien ne retombe lorsque la révélation arrive enfin car, si l'on se sent réellement soulager, on continue toujours à vouloir en savoir plus et, si ce n'est plus le suspense qui nous transporte, on se laisse tout aussi bien bercer et mener par les merveilles découvertes...